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LE PARCOURS DE GUSTAVE MOCQ AU DEBUT DU SIECLE DERNIER
ou 
LA BLESSURE QUI SAUVE LA VIE.


Gustave Mocq est né le 18 octobre 1890 à Carvin ; alors qu’il est encore en bas âge, son père s’installe, négociant en vieux métaux, rue Burgault à Seclin.
C’est dans ce quartier qu’il passe sa jeunesse avec son frère et sa sœur .Il perd sa maman très jeune et subit une éducation très austère : il doit vouvoyer son père et l’interpelle sous l’injonction de « Monsieur ». 
                                              
Ses études se voit perturbées par des crises de rhumatisme articulaires très douloureuses ; ce qui ne l’empêche nullement de maitriser la rédaction et l’écriture. Il se passionne pour la musique et fréquentant avec assiduité l’harmonie de Seclin ; à 18 ans il décroche un prix de conservatoire à Lille.

Entre ses activités scolaires, dès l’âge de douze ans, il aide au travail de son père et mène les attelages tirant les camions acheminant la ferraille.
Vers quatorze ans quittant l’école ; il est placé comme apprenti et intègre les mines d’Ostricourt pour apprendre le métier de chaudronnier. Il excelle en la matière, appris par des maîtres ouvriers dignes du compagnonnage.

Les années passent ; de la classe 1910, il est appelé au service militaire la même année et rejoindra le 45e régiment d’infanterie en garnison à Laon. Après plusieurs mois d’instruction ses capacités musicales lui feront intégrer la musique régimentaire.

Citadelle_Gustave Mocq 1914 002-1.jpgGustave Mocq 1914.jpg


Après avoir arpenté les chemins escarpés menant à la citadelle pendant près de trois ans ; il est rendu à ses foyers le 1er août 1913.
Dès lors il s’installe comme artisan  à Houplin-Ancoisnes et épouse Hélène Choteau originaire de Saméon.
Aimant le travail bien fait ses affaires marchent .

Bientôt cette stabilité retrouvée se voit menacée par les bruits de guerre qui parcourent l’Europe.                                                                                            
Le 2 août 1914 Gustave est mobilisé, il rejoint Laon et retrouve son pantalon rouge et sa capote « gris de fer bleuté ».

Gustave_Mocq_005.jpgGustave_Mocq_006.jpgGustave_Mocq_007.jpg
 
En temps de guerre les musiciens gardent leur fonction et sont brancardiers auxiliaires ; cette fonction n’est pas couverte par les accords de Genève comme pour le personnel du service de santé mais par contre leur permet de détenir une arme.
Bientôt la campagne de Belgique commence : il faut arrêter les Prussiens !

L’entrée en Belgique se fera le 6 août ; pour cela des autobus de la ville de Paris sont réquisitionnés (40).
L’avancé ira jusque Namur qu’ils occuperont quelques jours jusqu’au 23 août « mainte fois nous retraitions à pieds pour remonter en autocar, après quelques heures de repos,et remonter au front ».

C’est bientôt la retraite à partir du 24 elle se veut en bon ordre, coupée de résistances éphémères et très meurtrières ; la frontière est repassée vers le 26 août près de Rocroy.
Le 27 août un violent tir de barrage harcèle les troupes en repli ; Gustave et ses camarades relèvent des blessés sous un feu violent près d’un carrefour. Ces sauveteurs se voient coupés de leur unité et manqueront à l’appel. Leur officier aux nerfs émoussés par cette éternelle retraite les considéra comme « planqués ». Il faut des exemples ! Ils ont beau s’expliquer : rien n’y fait ils seront bon pour le conseil de guerre.
Par chance le général de division est en visite à l’état-major ; Gustave, soldat de 2e classe saisi l’occasion et tente le tout pour le tout ; il se présente à lui sans passer par la voie hiérarchique . Il explique son cas ; le général prend ses dires en considération est ordonne une enquête : nos brancardiers sont réhabilités et recevront une citation à l’ordre de la division pour acte de courage. (Voir copie du livret militaire).
La retraite se poursuit, sous la poussée allemande, des éclaireurs ennemis s’infiltrent dans notre dispositif. Un cavalier prussien débouche d’un bois et charge ; Gustave ajuste son tir en considérant le mouvement : le cheval s’écroule touché à l’encolure son cavalier est tué par un autre tir.
Près de Guise à Le Hérie-La- Viéville Gustave et dix-huit de ses compagnons avancent, déployés en tirailleur , progressant dans un chemin menant à un château ou une maison de maître. Un violent tir d’artillerie ennemie se déclenche, un obus s’abat au milieu du groupe. Il reste seul en vie parmi ses  camarades, éventrés, hachés par la mitraille. Il doit la vie à l’arbre qui le couvrait pendant sa marche ; Il fait le point : son genou est arraché par un gros éclat, à l’arcade sourcilière, l’orbite est légèrement ébréchée mais l’œil n’est pas touché.
Se traînant dans le fossé Gustave applique un pansement sur sa blessure,    engage une balle dans son fusil et attend son destin.
Après plusieurs heures d’attente , des soldats français d’autres unités se profilent à la lisière d’un champ ; il s’empresse de lier son mouchoir au bout de son fusil et l’agite désespérément . Les hommes l’ont aperçu : il est sauvé.
Une silhouette s’approche de lui ; à quelques mètres le militaire s’écrit : «  Gustave » celui-ci répond : «  François » ; cet homme qu’il n’a pas vu depuis des mois n’est autre qu’un camarade qu’il côtoyait dans la vie civile à l’harmonie de Seclin.
Rien ne prévoyait leur rencontre dans un moment aussi tragique, à cet endroit précis et pourtant s’était bien vrai : il ne rêvait pas.
François Planque le hissa sur son dos et le ramena vers son unité ; après les premiers soins, il sera pris en charge par une ambulance qui l’emmènera vers une gare ou un convoi sanitaire est formé.
Allongé dans un wagon, à même la paille il voyagera toute la nuit en direction de Paris. Près de lui un blessé gémit, de temps à autre,  Gustave lui donne à boire par petites gorgées ; arrivé à destination à la lueur du jour il découvre que ce blessé est allemand. Le malheur et la souffrance n’ont pas de nationalité.
De la gare de l’Est il est transféré à l’hôpital du Val de Grace qui en ce début de guerre à encore sa capacité d’accueil.
Là on peut se permettre de mettre en pratique les derniers progrès de la chirurgie traumatique ; un grand chirurgien le prend en charge : « On ne te coupera pas la jambe mon gars » (Ce qui deviendra systématique les années suivantes devant l’avalanche de blessés et le retard imposé par leur transfert).
Plusieurs opérations permettront de préserver le membre qui tuméfié et rigide gardera sont rôle ambulatoire.
Des éclats sont prélevés sur tout le corps ; cinquante ans plus tard certains, minuscules, ressortiront sous forme d’abcès.
Pendant dix-neuf mois Gustave « entera » les salles et les couloirs du Val de Grace et de l’hôpital annexe d’Enghein bientôt sur un fauteuil roulant puis avec des béquilles, réconfortant l’un ou l’autre de ses compagnons d’infortune, répondant aux courriers de ses camarades.
Informée de son hospitalisation, son épouse :Hélène décide aussitôt de lui rendre visite à Paris ; elle emprunte un véhicule torpédo et son chauffeur. Le voyage est long, le véhicule non fermé à l’arrière. Hélène prendra un grave coup de froid qui de complications pulmonaires dégénèrera en tuberculose : elle en décédera quelques années plus tard.
Le 28 mars 1916 le conseille de réforme désigne le soldat de 2e classe Mocq Gustave inapte au service actif mais apte au service auxiliaire.
Dès lors Gustave rejoint les dépôts de son régiment à Lorient où il exercera la fonction d’armurier. Il réceptionnera et réparera des armes détériorées ramenées du front. Son régiment d’origine est alors parti pour Salonique et engagé dans les Dardanelles.
A Lorient Gustave se fait des amis et s’installe dans sa nouvelle vie d’ouvrier armurier en maîtrisant son nouvel handicape.  Il y laissera de bons souvenirs et un échange de courriers émouvants se perpétuera notamment avec un jeune garçon à qui il répara un accordéon.  
Le 11 novembre 1918, l’armistice signé, rien n’est joué : il faut sortir le pays du chaos. Toujours sous contrôle militaire, Gustave reprend du service au service d’entretien des mines d’Ostricourt . Il sera réellement démobilisé le 22 mars 1919.
Il peut enfin reprendre ses activités d’artisan, se refaire une clientelle avant de déménager pour Saméon en 1923.
Huit années ont passé entre l’appel sous les drapeaux et cette dernière démobilisation ; huit année volées à sa jeunesse, huit années d’incertitude, huit années données au pays ; mais il était vivant. Sa blessure l’avait très certainement sauvé.
 
Carte postale de Gustave Mocq de 1912
 
Carte_Laon_Gustave_1912.jpg

Gustave_Mocq_Verso_Carte.jpg

 
D’après les récits et anecdotes relatés par Gustave Mocq à son petit fils .


                            Henri Morel.  (2007)
           
 

Date de création : 17/04/2009 ! 19:12
Dernière modification : 19/12/2009 ! 08:40
Catégorie : - Témoignage
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